Bouclet et papier – le coeur à la fête
Un matin d’octobre, je me suis rendue chez Boucle & Papier, sur le boulevard Saint-Laurent à Montréal, pour une séance photo festive. Dans l’autobus qui remontait la Main, les gens sans manteau souriaient, profitant des rayons de soleil presque trop généreux pour un matin d’automne et donnant du même coup le coup d’envoi idéal à cette journée épique qui se profilait.
Chez Boucle & Papier, la propriétaire, Jessyca Houle, et son équipe avaient assemblé plus de 400 ballons de fête pour en faire une guirlande incroyable. « J’aime ça quand ça bouge, je n’ai pas peur d’essayer des choses, m’a expliqué Jessyca. Au pire, ça ne fonctionnera pas, mais on aura essayé! » À l’intérieur, la boutique était remplie de ballons de toutes les couleurs qui s’agençaient parfaitement aux collections de papeterie déployées sur les murs et sur les différents présentoirs.
Situé angle Saint-Laurent et Saint-Viateur, Boucle & Papier a célébré son deuxième anniversaire cet été (avec une guirlande de ballons, bien sûr!). « Chaque anniversaire me rend vraiment heureuse! », lance Jessyca. Et on la comprend : alors qu’une majorité d’entreprises en démarrage doit fermer ses portes dans ses premières années d’existence, Boucle & Pa- pier a le vent dans les voiles. Il faut dire que le concept de la boutique — un endroit spécialisé en cartes de souhaits, en accessoires de bureau et d’anniversaire ainsi qu’en papeterie de fantaisie — est peu répandu au Québec. « La tradition de donner des cartes pour toutes sortes d’occasions est davantage ancrée chez les anglophones, constate la propriétaire, ce qui fait que j’ai surtout trouvé mon inspiration du côté américain, comme à New York. » Cela explique également pourquoi Boucle & Papier propose une grande collection de cartes en anglais, en plus de nombreuses cartes en français. « Les produits qui entrent ici sont tous des coups de cœur. Je présente des petites et des grandes entreprises, canadiennes et américaines », explique la propriétaire. Le tout est agencé en boutique de façon esthétique et intuitive, de sorte que l’on s’y promène avec aisance, passant d’un coup de cœur à un autre.
Le choix de s’installer dans le Mile-End répond aux mêmes besoins. Quartier éclectique au cœur de Montréal, le Mile-End regroupe des travailleurs, des résidents et des touristes, aussi bien francophones qu’anglophones, qui représentent un bassin de clients diversifiés pour la boutique. À preuve, bien que la plupart des clients qui visitent la boutique soient des femmes dans la vingtaine, le matin de notre rencontre, c’est un homme d’un certain âge qui a d’abord cogné à la porte à la recherche d’un journal de voyage pour sa fille (il a opté pour un modèle classique à la couverture noire) et d’accessoires pour le personnaliser.
Trois enfants et une boutique
Bien que la boutique ait fêté ses deux ans, l’idée derrière Boucle & Papier a germé bien avant. « J’ai eu l’idée il y a cinq ans, pendant mon premier congé de maternité, raconte Jessyca. Au cours d’un voyage en Californie, je suis passée pour la seconde fois dans une boutique dont le concept me plaisait et, comme j’avais toujours voulu avoir une entreprise, ça m’a beaucoup attirée… Mais, mon congé se terminait un mois plus tard et j’ai bien dû retourner au travail! »
C’est donc au cours de son second congé de maternité qu’elle a pu élaborer son plan d’affaires et faire de son rêve, une réalité. « J’ai ouvert la boutique le 19 juin. À la mi-juillet, j’apprenais que j’étais enceinte à nouveau! », lance- t-elle en riant. Cela aurait bien pu compliquer les plans, mais Jessyca est rassurante : « Ça a super bien fonctionné! Lucie venait partout avec moi. Elle a grandi ici. Elle faisait ses siestes dans le back- store! Et puis, le fait d’avoir des enfants m’a obligée à déléguer certaines tâches et à faire confiance à des employés, ce qui est un gros plus pour Boucle & Papier. »
La boutique repose donc maintenant sur une équipe de confiance, comptant trois employées à temps partiel et une employée à temps complet, en plus de Jessyca. « Quand j’engage quelqu’un, je lui fais en- tièrement confiance. J’ai engagé des filles créatives, le fun, avec qui on a envie de passer du temps », explique-t-elle. Le processus de sélection va dans le même sens : il n’est pas rare que les entrevues se déroulent dans un café du coin ou autour d’une crème glacée sur le trottoir face au Kem CoBa.
Bien ancrée dans le quartier où elle travaille, Jessyca est radieuse lorsqu’elle parle de son local : « J’ai visité plusieurs locaux, mais celui-ci s’est imposé à cause de son emplacement. Le quartier est unique et puis la garderie est à trois portes. Je vois mes enfants tous les jours! » Pour lui donner raison, le groupe de son fils cadet passe devant la vitrine à deux reprises pendant notre entretien. Chaque fois Jessyca lui envoie la main tout sourire pendant que les enfants ébahis regardent l’amoncellement de ballons au sol de la boutique.
L’émerveillement et le sens de la fête sont contagieux dans la famille, semble-t-il. « J’adore faire la fête! Je suis le genre de personne à être debout très tard la veille de l’anniversaire des enfants pour faire une guirlande… J’aime recevoir, j’aime décorer! J’aime aussi les rassemblements improvisés. J’habite en ville, j’ai beaucoup d’amis qui habitent proche. On s’organise facilement des 5 à 7 dans le parc, avec nos familles », me raconte Jessyca.
Des filles et une guirlande
Midi a sonné quand nous sortons finalement la guirlande à l’extérieur. Sur le trottoir, l’effet est immédiat : les passants s’arrêtent, posent des questions, nous sourient. Jessyca rencontre une amie et prend des nouvelles. Des petits groupes interrompent leur marche pour prendre des photos. Il faut dire que ce n’est pas tous les jours que l’on croise cinq filles, un photographe, et plusieurs mètres de ballons de fête sur la rue! En marchant vers une ruelle à quelques coins de rue où l’on prendra les dernières photos, Jessyca me parle avec enthousiasme de ses projets et de sa vision d’affaires. Quand je lui demande de décrire sa boutique en cinq mots, elle a un peu de difficulté – « j’aime tellement parler que j’ai de la difficulté à me limiter à cinq mots! », lance-t-elle – mais elle y parvient rapidement : « coloré, spontané, frais, comme dans vent de fraîcheur, nouveauté et chaleureux! ». Je ne peux que lui donner raison.
Texte
Catherine Ouellet-Cummings
Photos
Mathieu Lachapelle